La pièce dansée AMAE-POYOUZON s’inspire de la cérémonie traditionnelle « Poyouzon », l’équivalent africain du baptême. Ce rituel ancien consiste en la dation du nom et il existait bien avant l’arrivée des Occidentaux. Son objectif est d’accueillir le nouveau-né dans la communauté humaine.
AMAE-POYOUZON redonne vie à ce précieux héritage culturel dont la transmission a parfois été rompue par les guerres, l’esclavage. Ou simplement avec le temps, alors que de nouvelles valeurs, tel le matérialisme, prennent le dessus.
En revisitant la dation du nom, le chercheur et chorégraphe Alphonse Tierou, auteur de AMAE-POYOUZON, nous rappelle que donner un nom c’est donner une vie, d’après la philosophie africaine, en particulier celle des Masques de l’Ouest africain. Le nom est l’essence et la vérité de celui qui le porte. Il a une signification qui est fixe, tandis que l’étendue de cette signification est variable.
Métaphorique, la narration chorégraphique de AMAE-POYOUZON suggère aussi comment chacun peut transcender sa propre destinée et se (re)construire grâce à l’imagination créatrice. Ce spectacle, dans sa version originelle, s’adresse aux Africains et à leur diaspora, parmi laquelle se trouvent des descendants d’esclaves. Cette pièce a également une portée universelle. Car elle met en lumière le fait que tout homme ou femme peut s’élever, par-delà son histoire personnelle ou collective, et inventer le future, quelles que soient ses origines.
Avec le titre, tout est dit. Amae signifie « n’oublions pas » et Poyouzon,« baptise-le », en wêon, une langue de Côte d’Ivoire. Selon un penseur francophone : « L’important n’est pas ce que l’on a fait de nous, mais ce que nous faisons de ce qu’on a fait de nous. ».
Dans le même esprit, les chorégraphies d’AMAE-POYOUZON trouvent une source d’inspiration inépuisable auprès des danses traditionnelles d’Afrique. Surtout, la démarche consiste à explorer ce patrimoine continental pour faire émerger une danse totalement nouvelle et revigorante, telle une célébration de la vie. Ce faisant, Alphonse Tierou s’appuie sur plusieurs années de recherches, théoriques et pratiques, et qui l’ont conduit à définir la Danse Dooplé, un nouveau vocabulaire gestuel qui utilise les dix mouvements de base, commun à tout le continent africain.
La première représentation de AMAE-POYOUZON a eu lieu à Fort-de-France (Martinique) en mai 2006, à l’occasion de la Commémoration de l’abolition de l’esclavage, devant un public d’environ 10 000 personnes. Auparavant, Alphonse Tierou a été officiellement reçu, en décembre 2005, par Aimé Césaire (célèbre écrivain et l’un des père du mouvement culturel de la Négritude) et par le maire de Fort-de-France.
AMAE-POYOUZON s’appuie sur un dialogue permanent entre les danseurs et l’orchestre de percussions livedirigé par Olivier Serigba, musicien aguerri et auteur du Langage de la percussion africaine, une méthode unique d’enseignement des rythmes.
A Fort-de-France 2006, le spectacle était accompagné par Sulaiman Hakim qui, avec son saxophone, a apporté une touche jazz à cet ensemble harmonieux. Également compositeur et arrangeur, ce multi-instrumentiste renommé a travaillé avec des artistes tels que Percy Sledge, Alpha Blondy, Salif Keïta ou encore Ismaël Lo.
Spectacle à géométrie variable, AMAE-POYOUZON peut être accompagné par d’autres artistes, musiciens ou chanteurs. Il peut aussi être joué par un nombre variable d’interprètes.